Collision est un film qui vient percuter vos sens, vos émotions et vos préjugés. Entremêlant habilement la vie d'une dizaine de personnages, Paul Haggis nous fait découvrir les peurs d'une Amérique calfeutrée derrière la grande idée du Melting-Pot. Melting pot bouillonnant prêt à vous sauter à la figure tant les idées sur les uns et les autres sont pleines de clichés, d'incompréhension, de préjugés sans fondements.

La fresque et les frasques du melting-pot américain

On découvre peu à peu les personnages, où plus exactement les classes sociales les blacks des ghettos, qui jouent de leur statut de victime du racisme pour mieux terroriser les blancs; les blancs des classes moyennes (et des plus basses) qui se sentent laissés pour compte du fait des aides aux minorités. Les blancs de la classe supérieure, qui veulent garder leur image de marque de citoyen modèle, balayant à coups de dollars les problèmes raciaux plus loin dans la rue. Les blacks bourgeois, qui ne s'identifient à personne d'autre, et qui vivent entre eux malgré eux. Les mexicains, besogneux, qui font le travail que personne ne veulent, torchant la fiente de l'Amérique. Les asiatiques impassibles cachant leurs honteux secrets et enfin, les derniers nés de l'immigration américaine, les arabes, bouc émissaires d'une Amérique multi-raciste malgré leur volonté d'intégration.

Un état proche de l'implosion

Paul Haggis ne montre toutefois pas une Amérique au bord de l'explosion, mais plus proche d'une implosion introspective. le climat n'est pas tendu, il est serein, glacé et d'une profonde détresse. On ressent la même détresse que dans "21 grammes" d'Iñárritu, mais sans la pesanteur du sujet. On découvre le puzzle de ces destins croisés et ces accidents émotionnels qui viennent frapper en pleine figure. A chaque fois, c'est un air-bag d'émotions qui vous emplie les poumons, et on assiste à un carambolage d'émotions. Les 2 scènes avec la fille du serrurier mexicain sont d'une beauté magistrale. Une scène toute simple et une scène hollywoodienne qui vous prennent les tripes et vous dévoilent un cœur saignant d'amour et de compassion. On en reste sans voix. L'une des plus belles scènes que je connaisse...
Paul Haggis évite de justesse les sentiments trop mielleux, et ceci grâce notamment à des acteurs magnifiques, qui savent jouer en finesse.

Une distribution de seconds couteaux de premier plan

Et quels acteurs, quelle distribution! Il faudrait parler de tous les acteurs un à un car ils sont tous vraiment excellents. Parlons des plus connu et en premier lieu de Don Cheadle, qui est égale à lui-même, sa prestation d'homme blessé qui garde toute sa dignité malgré les épreuves est remarquable. Matt Dillon est aussi phénoménal en petit flic raciste alors que Sandra Bullock joue à merveille la bourgeoise coincée (joue-t-elle vraiment d'ailleurs ?). Ryan Philippe est aussi stupéfiant dans sa vue idéaliste du monde de jeune flic voulant sauver le monde.
La palme d'interprétation revient aux acteurs des minorités, et en premier lieu à Michael Peña, qui joue le jeune mexicain serrurier qui veut donner un sens à sa vie et à celle de sa fille. Il est tout simplement bouleversant d'émotions et de justesse. N'oublions pas Laurenz Tate, le jeune black qui tient avec son comparse, le chanteur rap Ludicrous, les premiers rôles de ce film qui vous ouvre les yeux sur ce qu'est vraiment l'Amérique du XXIème siècle, une Amérique paumée dans ses préjugés sur le monde, persuadée que l'autre est le mal.