C'est arrivé près de chez vous
Critique: En faisant tout le contraire de ce qu'on leur avait inculqué, ces jeunes cinéastes belges ont lâché une véritable bombe dans le cinéma francophone des années 90, et ainsi créé à leur insu une nouvelle forme de Cinéma, que Lars Von Trier nommera plus tard le "Dogme". Tourné caméra à l'épaule en noir et blanc avec un minimum de budget, "C'est arrivé près de chez vous" a tout du dogme avant l'heure, à la seule différence que ce film se veut tout d'abord anti-conformiste, anti-intello et donc par conséquent anti-dogme. C'est d'ailleurs pour cela qu'on en a jamais parlé en tant que tel (voir le site du dogme "http://www.dogme95.dk") mais il faut l'avouer: ces belges ont du génie. Lars Von Trier est un plagieur (de génie... ...lui aussi... ...à ce qu'il parait...). Enfin bon, fermons la parenthèse, vous trouverez certainement un autre film de fiction tourné à l'épaule avec un minimum de trucages et de vraies personnes qui peut faire office de pré-dogme. Là n'est pas le débat, seulement applaudissons l'audace de ces jeunes cinéastes. Et quelle audace! Tuer des vieux, des enfants, des postiers, des noirs... tout cela dans la plus grande banalité et en plus réussir nous faire hurler de rire, voilà du génie scénaristique. Ce film provoque tous les types de rire, le fou rire, le rire cynique, le rire noir. Toutefois, même les estomacs les plus solides finiront par une indigestion de rire, à savoir le rire jaune. "C'est arrivé près de chez vous" vous repousse dans les limites du cynisme mais ne se veut pas donneur de leçon: c'est à vous de décider s'il est bien ou mal de rire de tout. Comme le dit Ben, le personnage central du film: "Tue une baleine, t'auras Greenpeace et le Commandant Cousteau sur le dos; tue un banc de sardine, laisse-moi te dire qu'on t'aidera à les mettre en boite!". Ce film vous mettra en boîte à l'insu de votre plein gré, seuls les plus psychorigides d'entre vous ne riront pas. En effet, nous remarquons que bien trop tard notre soif de sang et notre complaisance face aux malheurs des autres. Faut-il rire de tout? Je pense que oui. Ce film est une farce monumentale qui vous ouvre les yeux sur l'aspect marketing audiovisuel auquel nous sommes tous confrontés, et sevrés au plus haut point. Certes, on peut quand même avouer que ce film est un délire ayant mal tourné, mais quel délire! Les dialogues de Benoît Pooelvorde sont simplement à pisser de rire, avec en plus cet accent belge inimitable. Qui n'a pas repris au moins une fois dans sa vie les bribes de discours de Benoît. Il attaque tout au vitriol, ne ménageant personne, ni le garçon de café avec sa vilaine peau, les noirs et leur soit-disante grosse anatomie, les gens du show-biz qui sont tous plus ou moins homosexuels, mais également les riches sans liquide, les enfants qui ne rapportent pas, les nains et leurs os lourds, les vieux qui font caca partout et surtout, "cette petite garce qui sucera des bites comme sa mère"... Oops, désolé, c'était plus fort que moi. Enfin, malgré ses attaques, le personnage de Benoît est attachant, en dépit de sa suffisance et de ses opinions sur tout et sur rien. On est envoûté par son charisme à 2 francs (belges) malgré tous les crimes qu'il commet. Pour conclure, car il m'est impossible de terminer sur une note sérieuse, petite anecdote amusante, à savoir que l'affiche du film a subi une légère modification. En effet, à l'origine, Benoît tire sur un bébé (on y voit une tétine giclée au lieu d'un dentier) et non sur un vieux. Faut-il considérer les vieux comme des sardines? Extrait: La mamie et son cachet Autre(s) film(s) du réalisateur |