Martyrs
Critique: Il y a des films qui vous frappe au visage et qui vous arrache la peau en même temps. Martyrs fait partie de ceux-ci et il est fortement déconseillé aux âmes sensible: en effet, c'est une vraie sinécure d'assister à cet acharnement de violence. Je comprends maintenant mieux pourquoi ce film avait tant défrayée la chronique lors de sa sortie. /p> Interdit aux mineurs?Martyrs a donc connu un sacré débat avec la censure française. Menacé d'une interdiction au moins de 18 ans, le film est finalement sorti en salles assorti d'une interdiction aux moins de 16 ans, avec avertissement. Ce qui est tout à fait normal. C'est un film choc; et les adolescents qui se sentent mal dans leur peau, qui ont parfois tendance à l'auto-mutilation, risquent de trouver là un exutoire malsain et morbide. Une quête schizophrénique?Le film raconte donc dans un premier temps l'adolesence de Lucie, une fois libérée de sa terrible séquestration, et sa tentative de vivre normalement dans un foyer d'accueil. Mais tellement traumatisée, elle s'imagine toujours poursuivie par son double, toujours séquestrée, venant la griffer et la mutiler durant la nuit. Et puis d'un coup, paf, nous sommes 15 ans plus tard, avec la splendide Mylène Jampanoï, qui vient trucider toute une famille bien bourgeoise comme il faut. On se croirait dans "Baise-moi" de Virginie Despentes avec toute cette violence gratuite et ce sang. Violence totalement gratuite infligée par une jeune femme que l'on comprend dérangée et qui témoigne de signes qui nous laissent entendre que ce n'est ni la première ni la dernière famille qu'elle vient de liquider. Ce massacre semble n'être que le témoignage de tant d'autres, preuve des démons qui hantent Lucie.Et paf, le coup de marteau du juge tombe et nous offre un rebondissement plein d'effroi: la folie de Lucie n'est pas si irréelle que cela. Une première vérité nous saute à la figure et nous glace le sang. Le réalisateur nous invite alors à une nouvelle plongée dans l'horreur; passage qui m'a rappelé un passage des "Racines du Mal" de Maurice Dantec avec la famille Granada (lorsque Darquandier descend dans la cave). Je ne peux en dire plus car cela serait vous gâcher le plaisir de ce twist scénaristique. Descente en enferEt paf, deuxième coup de tonnerre qui vient mettre à bas tout ce que vous pensiez sur la suite du film. Et nous n'en sommes qu'à la moitié. Bigre, mais où suis-je tombé? Pas loin de l'enfer, apparemment. Il m'est encore impossible de raconter la suite mais sachez que toute cette violence que l'on prend en pleine poire est "justifiée": elle vous mène là où vous refusez d'aller. Cette violence déchirante est nécessaire et impérative pour le final. Cette violence se révèle en effet libératrice, et je ne pensais pas que j'en arriverai là . On savoure la fin de ce calvaire, avec un gout de sang au fond de la gorge, tellement notre âme a eu mal.J'en suis toujours un peu retourné et je pense toujours à ce film, et paradoxalement, ce ne sont pas les scènes gores qui m'obsèdent. Non, c'est le message final, qui a de quoi vous interpeler, et je ne sais comment formuler mes interrogations et l'appréciation sur ce film. Pascal Laugier a parfaitement réussi son pari, de faire à la fois un film d'horreur et un film d'auteur. C'est impossible de dire que c'est un chef d'oeuvre, vu l'horreur, mais une certitude: dans les cercles des enfers de Dante, il doit être premier au box-office. Extrait: Making of Autre(s) film(s) du réalisateur |